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« Profession expert criminel, Profiler »

Michèle Agrapart-Delmas a pratiqué plus de deux mille expertises criminelles. Elle a établi des typologies en matière de « profilages » par l’étude de la victime, de la scène du crime, des divers rituels, d’une éventuelle signature d’un tueur en série… Récits*.

Le  » profilage « , traduction approximative du mot anglo-saxon  » profiling « , en est à ses débuts en France, mais il est très médiatisé en raison de la diffusion de films et de feuilletons tels que Hannibal ou Profiler. Il s’agit d’une démarche d’analyse du crime que l’on dit nouvelle et qui est à considérer avec prudence. D’autant que l’on utilise les modèles américains, ce qui est une erreur. Statistiquement, nous n’avons heureusement que peu de serial killers en France, environ un identifié tous les deux ans. Nous n’avons donc pas vraiment besoin de  » profiler « . Par ailleurs, le FBI fait un peu marche arrière sur cette technique, les résultats n’étant pas toujours à la hauteur des engagements financiers. Sur le vieux continent, il s’agit plutôt de conseils d’un expert à des enquêteurs, par la prise en charge de la dimension psychologique d’un crime, que d’un vrai profilage effectué par un fonctionnaire de police en concomitance avec l’enquête criminelle. Cependant, alors qu’il y a plus de faux profilers que de vrais tueurs en série, certains experts sont commissionnés pour collaborer à des enquêtes concernant des crimes, pour la plupart des crimes uniques. Cette technique, car il ne s’agit que d’une technique, allie à la fois les compétences d’un enquêteur criminel et celles d’un spécialiste du comportement humain. Si elle est récente dans son utilisation, elle existe depuis longtemps dans la littérature comme Sherlock Holmes. La France connaît quelques tentatives d’identification informatisée. Elle a peu de tueurs en série, habituellement nommés  » tueurs multirécidivistes « . Jusqu’à la fin du XXe siècle, aucun programme informatique n’existait. Depuis peu, différentes approches sont utilisées. Le métier de profiler n’existe pas en tant que tel en France . Cependant, depuis quelques années, les juges d’instruction font appel à des  » profilers occasionnels « . Dans le cas d’un tueur multirécidiviste, on s’attachera à l’étude des victimes, aux modes opératoires et à l’élaboration d’un profil type, en fonction des actes commis, des lieux, des armes, des sévices sexuels… Le profilage peut aussi être demandé en cas de doute du magistrat instructeur sur la réalité d’un suicide. Il faut alors déterminer si la personnalité du  » suicidé  » est compatible avec le mode opératoire utilisé, ses éventuels antécédents suicidaires, les motifs pouvant entraîner le passage à l’acte comme la prise de psychotropes, d’alcool…
Cas & témoignage : Le Profil d’un Psychopathe – Elle a été retrouvée brulée vive dans sa voiture

Le crime des pervers
Leurs crimes sont en général des crimes de la perversion, c’est-à-dire des crimes sexuels : agressions sexuelles, viols, pédophilie. Un détenu sur cinq est un agresseur sexuel. 50 % des verdicts des cours d’assises concernent des agressions sexuelles, 25 % des viols de mineurs sont commis par l’entourage familial. La progression en est inquiétante : le nombre des viols a été multiplié par quatre et celui des attentats à la pudeur, devenus agressions sexuelles dans le nouveau code pénal, par deux en 20 ans… Il est rare que l’on ait affaire à une simple perversion sexuelle, sans trouver une personnalité perverse. Dans ce cas, il y a toujours à l’origine une femme, essentiellement une mère perverse.
Cas & témoignage : Il agressait les femmes dans la rue au hasard


Les pédophiles

Ils représentent, avec leurs victimes, 40% de mes expertises. J’ai publié en 1998 une étude portant sur 400 pédophiles expertisés sur une période de 10 ans. Ce chiffre est maintenant enrichi d’une centaine de cas et ne concerne que des personnalités pédophiles et non incestueuses. En France, le profilage criminel est encore peu en usage dans le cadre de la pédophilie, mais j’ai eu en 1999 à l’étude le dossier d’un violeur de la région parisienne qui a agressé une trentaine d’adolescentes. Cette affaire a été médiatisée, et le dossier, dans sa presque intégralité, est paru dans un grand quotidien parisien… Contrairement aux feuilletons TV ou aux profilers qui identifient un auteur juste en analysant la scène du crime, je ne suis pas allée visiter les ascenseurs et les parkings d’immeubles où des milliers de personnes passent chaque jour depuis les faits … L’étude de la carte de la région parisienne, une approche Anacrim, des rapprochements entre les lieux, les transports, les heures… (travail qui appartient aussi aux enquêteurs) me semblent plus adaptés.

Janvier 2002

(*) D’après le livre « De l’Expertise Criminelle au Profilage »

 

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